Contexte juridique
Il existe de longue date dans l’Union européenne une Directive 98/6/CE relative à la protection des consommateurs en matière d’indication des prix des produits offerts aux consommateurs. L’article 6bis de cette Directive, introduit en 2019, impose d’indiquer dans les annonces de réduction de prix le prix antérieur appliqué par l’annonceur et ce prix doit correspondre au prix le plus bas appliqué au cours des 30 jours précédant l’annonce. La Cour de Justice de l’Union européenne vient d’apporter un éclairage intéressant sur l’interprétation de cette directive.
Résumé de l’arrêt
Aldi avait publié dans des folders publicitaires des annonces relatives au prix de bananes et ananas. Ces annonces se présentaient comme suit :
Au centre du cadre blanc, elle mettait en avant le nouveau prix appliqué (1,29€ dans la première annonce et 1,49€ dans la seconde) avec en bas à droite, indiqué de manière barrée, le dernier prix appliqué (1,69€ dans les deux cas). Au-dessus de ce cadre blanc était mentionné le pourcentage de réduction basé sur le prix barré dans une annonce (-23%) et « prix choc » (« Preis-Highlight ») dans l’autre annonce. En dessous, en caractères plus petits, était indiqué le prix le plus bas appliqué au cours des 30 derniers jours précédant l’annonce (1,29€ dans la première annonce et 1,39€ dans la seconde). Le prix le plus bas était dans un cas identique au prix annoncé comme étant une réduction et dans l’autre, inférieur au « prix choc » annoncé.
Le prix le plus bas appliqué au cours des 30 derniers jours étant indiqué dans l’annonce, Aldi estimait respecter l’article 6bis de la Directive. Cet article ne précise en effet pas la manière dont cette information doit être communiquée et n’interdit pas non plus de mentionner le dernier prix appliqué.
Toutefois, étant d’avis que cette annonce était susceptible d’induire en erreur les consommateurs concernant la réduction de prix, une association allemande protégeant les intérêts de consommateurs saisit le Tribunal régional de Düsseldorf. Ce tribunal doutant de l’interprétation à donner de la Directive, posa des questions préjudicielles à la Cour de justice de l’Union européenne.
Dans son arrêt du 26 septembre 2024, la Cour de justice de l’Union européenne fonde sa décision sur l’objectif principal de la Directive, qui est d’assurer une protection élevée des consommateurs. Bien que la Directive ne précise pas les modalités exactes de communication des réductions de prix, celles-ci doivent être dépourvues de toute ambiguïté. En conséquence, selon la Cour, l’article impose que toute réduction de prix annoncée, que ce soit sous forme de pourcentage ou d’une mention mettant en avant un avantage tarifaire, soit calculée sur la base du « prix antérieur », c’est-à-dire le prix le plus bas appliqué au cours des 30 jours précédant l’annonce.
Application en Belgique
L’article 6bis de la Directive 98/6/CE est transposé en droit belge à l’article VI.18 du Code de droit économique. Par conséquent, l’interprétation de la Cour de justice de l’Union européenne s’applique pleinement en Belgique. Il convient toutefois de noter qu’une dérogation existe en droit belge pour les « biens susceptibles de se détériorer ou d’expirer rapidement ». Cette dérogation est permise par la Directive 98/6. Elle concerne au premier plan les denrées alimentaires. Ainsi, il n’est pas obligatoire, en cas d’annonce de réduction de prix, d’indiquer le prix antérieur le plus bas des 30 derniers jours pour ces produits. Le fait de baser l’annonce de réduction de prix sur un prix antérieur pratiqué durant moins de 30 jours ne peut donc être considéré comme automatiquement illicite.
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